Emotions et déviation de Karine Aubry

En coaching, nos clients nous demandent fréquemment de les aider à avancer dans une direction où ils se sentent freinés, ou bloqués. Leur volonté trouve sa limite, leurs émotions viennent s’en mêler et ils s’en passeraient bien ! 

Il se peut qu’être soutenus leur permette de dépasser cette difficulté, et d’avancer pour ensuite continuer leur route seul. 

Mais régulièrement, nous avons une mauvaise nouvelle à leur annoncer : il va falloir prendre une déviation car la route est barrée... et dans certains cas, ce sera un vrai demi-tour !

Alexis vient de prendre un poste de manager qu'il visait depuis longtemps mais sans oser y prétendre. "Maintenant je suis au pied du mur, m'annonce-t-il. Je me suis engagé. Il va falloir que je m'occupe enfin de mon problème de prise de parole en public."

Concrètement, Alexis vient de signer pour un poste dans lequel il sera amené à faire des présentations devant 100 à 200 personnes, ou animer des séances de travail pour des groupes plus réduits. 

Le problème, c'est qu'il a toujours tout fait pour éviter ce type d'intervention dans lequel il n'est "vraiment pas à l'aise" : il s’est toujours arrangé pour échapper aux prises de parole devant des grands groupes (plus de 20 personnes) en déclinant les propositions, en envoyant un collaborateur à sa place, ou en proposant une autre forme d’intervention en sous-groupes. 

Quand il est contraint de prendre la parole, il prépare pendant des heures, puis, sur place, se concentre sur son support qu’il déroule méthodiquement (pour éviter les blancs), en faisant en sorte d’en finir rapidement. Il lui arrive alors de se sentir comme en apnée, mais il respire une fois la présentation terminée, tout en se disant qu’il est, décidément, vraiment nul en prise de parole.

Alors aujourd’hui, Alexis vit une forme d'angoisse qui l'étreint de plus en plus quand il pense à ce qu’il va devoir affronter dans ce poste, qu’il a accepté. Des pensées le hantent, qu’il chasse en se changeant les idées, en se plongeant de plus en plus dans le travail - heureusement il a fort à faire.. Mais les premières échéances de son nouveau poste approchent, avec une réunion plénière dans un mois, où il va devoir être convaincant et sans support...

"J'aimerais que vous m'aidiez à me débarrasser de cette angoisse, il n'y a aucune raison de se mettre dans des états pareils pour une simple prise de parole où il n’y a pas de l’enjeu : ce sont des équipes internes, sur des sujets que je connais. Je voudrais y prendre du plaisir comme mes collègues ! Être normal..."

Alexis se dit prêt à s'attaquer à ce défi, à se lancer, “de toute façon, je n’ai pas le choix”. Il a envisagé de boire un verre avant ses présentations, ou de prendre un demi Lexomil mais il sent que ce n’est pas la solution. Il veut “régler ce problème”, “le prendre à bras le corps”, il se dit “prêt à aller de l’avant”. 

Même si Alexis, très volontaire, est prêt à se faire violence et à rouler sur cette route défoncée bordant un ravin à pic, je dois lui annoncer la mauvaise nouvelle :

Pour être moins angoissé, il va falloir... avoir davantage peur !

L'angoisse qui lui barre la route porte en effet un panneau en forme de une flèche inflexible :

"Route barrée, déviation obligatoire : 

Prendre la Route des Mille Frayeurs à 2km"

Car le courage est d'affronter ses peurs et non de courir pour les laisser derrière... car alors elles nous rattrapent et nous hantent. Jamais elles n’ont autant de force que quand nous refusons de les regarder en face. 

Alexis a accepté de lister ses peurs les plus terribles au sujet de la prise de parole en public, et d’imaginer les conséquences des conséquences d’une prise de parole ratée. Ce voyage qu’il a entrepris lui a demandé de faire face.

Sur la route des Mille Frayeurs, il a traversé la brume de l’Inconnu, sursauté en entendant le ricanement du Ridicule, tremblé en passant sur le pont vermoulu de la Vulnérabilité, frissonné sous la pluie battante de l’Incompétence et puis… il s’est senti peu à peu moins angoissé et plus solide sur ses jambes, comme renforcé au terme d’un parcours initiatique. Il est revenu plus courageux d’avoir regardé ses démons en face. Il était prêt, désormais, à affronter ces mêmes démons dans la vraie vie.

Il est comme un lutteur qui n’osait pas regarder des vidéos du champion qu’il affronte dans quelques semaines, et tremblait chaque jour un peu plus : après les avoir visionnées, il se sent l’âme combattante, de s’être mesuré en imagination avant de le faire pour de vrai.

Ce qui terrifiait Alexis, c’était de perdre ses moyens en public. Il a traversé cette peur en annonçant son trac au début de sa première prise de parole. A son grand étonnement, il a eu un retour très positif des participants à la réunion. “Quel trac ? Je t’ai trouvé convaincant.”

Alors Alexis a recommencé, un peu plus vaillant mais toujours prudent. Il a veillé à saisir les opportunités, même petites, de prendre la parole, pour rester en selle. Il a aussi continué à annoncer régulièrement ce qu’il redoutait : “j’ai les idées qui se bousculent ce matin, faites-moi signe si je ne suis pas clair”, et à prendre une position basse chaque fois qu’il n’était pas expert du sujet “je ne suis pas un spécialiste, Jean-Michel vous en parlera mieux que moi.”

Ainsi, nous ne pouvons pas toujours faire l'économie de traverser des émotions désagréables, comme Frodon et Sam doivent traverser le Mordor dans le Seigneur des anneaux.

Comme Jeanne qui doit rester un peu assise, chaque jour, dans cette pièce sombre et glauque nommée “ma retraite”, pour apprivoiser cette nouvelle étape de sa vie, et accepter de laisser derrière elle sa carrière… pour mieux faire la place, demain - pas trop vite - à de nouvelles activités.

Comme Tom qui a besoin, s’il veut retrouver son élan, de faire le bilan objectif des erreurs qu’il a commises à la tête de sa start-up, de plaider coupable en son tribunal intérieur, parce que faute avouée devient ensuite moins pesante, comme une charge déposée du sac à dos. Tant qu’il ne fait pas ce détour, plus il essaye d’avancer, plus il se sent retenu.

Et si nos blocages nous signalaient que nous tentons de passer en force, d’une manière plus rapide en apparence, mais moins sûre et en tout cas moins durable que le détour auquel nos émotions nous invitent ?

 

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